Le CBD : effet de mode ou réelles vertus thérapeutiques ?

30 Déc,21 | Actualité nutrition santé

Le CBD, de son nom complet le cannabidiol, est commercialisé en France depuis juin 2021. Depuis, il a envahi les rayons et de nombreuses boutiques ont vu le jour : les « CBD shops ». Nous verrons ensemble dans cet article ses bienfaits, effets secondaires et l’état des connaissances scientifiques actuelles sur ce produit à la mode.

Le CBD : de quoi parle-t-on ?

Définition

La molécule du cannabidiol est un cannabinoïde présent dans les fleurs du cannabis (Cannabis sativa) identifiée en 1963. Le cannabinoïde le plus présent (et le plus connu) de ces fleurs est le delta-9-tétrahydrocannabinol (THC), principe actif du cannabis, molécule classée comme stupéfiant, responsable des effets psychoactifs (euphorie, relaxation), autrement dit « planant ».

Le CBD, issu du plant de chanvre, est retrouvé en de petites quantités dans cette plante. Il a la particularité d’agir également sur le système endocannabinoïde sans induire d’effet psychoactif ni d’état d’addiction. Cependant, ce produit ne peut pas revendiquer d’allégations thérapeutiques tant qu’il n’est pas autorisé comme médicament par l’Agence nationale de sécurité du médicament et produits de santé. 

La commercialisation du CBD est légale en France s’il provient d’une variété de cannabis cultivé dans l’union européenne et qu’il est spécifique en ne contenant que 0.2% de THC. Les variétés de cannabis varient beaucoup, et il est ainsi possible de faire varier les taux de CBD et de THC dans les cultures. Si sa concentration est plus importante, ils sont classés comme stupéfiants et sont illégaux. Les publicités concernant des produits contenant du CBD doivent se dissocier du cannabis pour ne pas en faire la promotion. 

Quel est son mode d’action ?

De structures chimiques très proches (C21H30O2), mais avec des arrangements d’atomes différents, le CBD n’induit pourtant pas les effets psychoactifs du THC. Il semble moduler l’action des endocannabinoïdes (des dérivés d’acide gras contenus dans les formés à partir de lipides contenus dans les membranes des cellules). Avec les récepteurs cannabinoïdes (CB1 et CB2), ils constituent le système endocannabinoïde qui module la libération de médiateurs ayant un rôle régulateur important sur le système nerveux central et sur le système immunitaire.

Les cannabinoïdes exogènes naturels de la plante de cannabis vont alors mimer les cannabinoïdes endogènes de notre organisme et influer le rôle régulateur sur le cerveau et sur nos défenses naturelles. Le THC et le CBD n’interagissent pas de la même manière sur ces récepteurs. Le CBD semble même ralentir et contrebalancer les effets du THC. En effet, son effet calmant pourrait limiter le sentiment d’angoisse provoqué par la consommation de THC. En effet, la consommation de CBD induit des effets de relaxation, décontration musculaire, réduction du stress et de certaines douleurs alors que le THC induit des effets de relaxation, d’euphorie, de faim et de troubles de la mémoire.

Pour cette raison, le THC est listé comme un stupéfiant, interdit par la loi française alors que le CBD pourrait être une cible thérapeutique interessante pour différents troubles tels que les douleurs, inflammations, nausées…

Sous quelles formes le trouve-t-on ?

Ce produit est retrouvé dans de nombreuses formes telles que :

  • les e-liquides, consommée dans une cigarette électronique, le CBD sera alors absorbé par les poumons,
  • des compléments alimentaires (des gélules), des capsules en gélatine contiennent une dose de CBD qui sera dégradée et déversée dans l’estomac,
  • des huiles, en ajoutant quelques gouttes à un aliment, une boisson ou directement sous la langue,
  • dans des produits comestibles (des tisanes, des bonbons, des glaces, du thé, des chewing-gums, des chocolats…),
  • sous forme de résine ou fleur

Il peut être consommé seul ou ajouté à notre alimentation, mais encore vaporisé ou appliqué sur la peau dans des produits cosmétiques (pommade, baume, crème…). Il est important de rappeler que sa commercialisation n’étant que très peu règlementée, il existe des quantités variables de concentrations entre les différents produits. Actuellement ces produits sont considérés comme des compléments alimentaires et non des médicaments, et à ce titre ne sont pas remboursés ni par l’assurance maladie ni par les mutuelles. 

Quels effets connus actuellement sur notre santé ?

Ces dernières années, l’utilisation thérapeutique et l’usage médical du CBD s’accroissent, et plus particulièrement contre la douleur (effets anti-inflammatoires et analgésiques) et en dermatologie (Eagleston LRM., et al., 2018). Cependant, son utilisation à des fins thérapeutiques est en débat et il n’existe pas de réglementation à son égard. Il est ainsi important de se pencher sur les preuves scientifiques émanantes à cette nouvelle utilisation.

Analgésique ?

Selon une revue de la littérature, le cannabidiol semble être bénéfique pour la qualité de vie mais sans aucun avantage clinique contre la douleur chronique non oncologique, la douleur liée à la spasticité dans la sclérose en plaques ou la douleur postopératoire aiguë. Les cannabinoïdes semblent avoir un avantage dans la réduction des nausées et des vomissements liés à la chimiothérapie (Riera R., et al., 2021). Ce produit introduit dans une huile topique, aurait des effets analgésiques chez quelques patients atteint d’épidermolyse bulleuse ainsi que des pouvoirs cicatrisants (Chelliah MP., et al., 2018).

Bon pour notre peau ?

Ce produit pourrait également être utilisé en dermatologie, et ne présente pas de pouvoirs allergènes (Patel PM. and Lio PA., 2021) ou dans des produits de soin de la peau. Il est commercialisé pour ses potentielles vertus hydratantes et anti-rides. Il aurait également un effet contre diverses maladies de la peau telles que l’acné, l’eczéma, le psoriasis, la dermatite et le prurit chronique (Nickles MA., et Lio PA., 2021). Cependant, les données actuellement sont insuffisantes pour prouver son innocuité et son efficacité (Jhawar N., et al., 2019).

douleurs_soin_cbd

Quels dangers ?

Les effets secondaires potentiels connus après une utilisation par voie orale sont la somnolence, le manque d’appétit et la diarrhée (Franco V. and Perucca E., et al., 2019). La pharmacocinétique des cannabinoïdes et les effets observés dépendent de la formulation et de la voie d’administration. Ils doivent être adaptées aux besoins de chaque patient.

Le métabolisme hépatique de ce produit par le cytochrome P450 pourrait également entraîner des interactions médicamenteuses (par exemple : inhibition du métabolisme du clobazam, un anxiolytique).

Cependant, ces effets indésirables pourraient être minimisés par la voie transdermique. Des interactions pharmacodynamiques peuvent survenir s’il est administré avec d’autres médicaments dépresseurs du système nerveux central, et une toxicité cardiaque peut survenir via une hypertension et une tachycardie avec des agents sympathomimétiques, dont les propriétés imitent la stimulation du système nerveux sympathique (Lucas CJ., et al., 2018).

Une équipe de recherche propose des lignes directrices recommandant certaines qualités d’un produit contenant du CBD afin de nous guider dans le choix de ces divers produits (VanDolah et al., 2019).

Ce produit pourrait ainsi être prometteur, mais des recherches approfondies sont nécessaires avant que les cannabinoïdes puissent être considérés comme des traitements sûrs et efficaces (Eagleston LRM., et al., 2018). Si vous faites le choix de tester ces produits, n’oubliez pas de demander conseils et d’avertir les professionnels de santé qui vous suivent.

Auteur : Marion Ricour, Docteure en Biologie Santé, Responsable Scientifique chez Pharmacodietetics

Ainsi que notre comité éditorial, composé de :

Grégory Guilbert, Pharmacien, Responsable de publication et CEO chez Pharmacodietetics

Caroline Melkonian, Responsable diététique chez Pharmacodietetics

Sources :

Bibliographie

Chelliah MP, Zinn Z, Khuu P, Teng JMC. Self-initiated use of topical cannabidiol oil for epidermolysis bullosa. Pediatr Dermatol. 2018 Jul;35(4):e224-e227. doi: 10.1111/pde.13545. Epub 2018 May 22. PMID: 29786144.

Eagleston LRM, Kalani NK, Patel RR, Flaten HK, Dunnick CA, Dellavalle RP. Cannabinoids in dermatology: a scoping review. Dermatol Online J. 2018 Jun 15;24(6):13030/qt7pn8c0sb. PMID: 30142706.

Franco V, Perucca E. Pharmacological and Therapeutic Properties of Cannabidiol for Epilepsy. Drugs. 2019 Sep;79(13):1435-1454. doi: 10.1007/s40265-019-01171-4. PMID: 31372958.

Jhawar N, Schoenberg E, Wang JV, Saedi N. The growing trend of cannabidiol in skincare products. Clin Dermatol. 2019 May-Jun;37(3):279-281. doi: 10.1016/j.clindermatol.2018.11.002. Epub 2018 Nov 29. PMID: 31178109.

Lucas CJ, Galettis P, Schneider J. The pharmacokinetics and the pharmacodynamics of cannabinoids. Br J Clin Pharmacol. 2018 Nov;84(11):2477-2482. doi: 10.1111/bcp.13710. Epub 2018 Aug 7. PMID: 30001569; PMCID: PMC6177698.

Nickles MA, Lio PA. Cannabinoids in Dermatology: Hope or Hype? Cannabis Cannabinoid Res. 2020 Dec 15;5(4):279-282. doi: 10.1089/can.2019.0097. PMID: 33381641; PMCID: PMC7759267.

Patel PM, Lio PA. Safety and Sourcing of Topical Cannabinoids: Many Questions, Few Answers. J Clin Aesthet Dermatol. 2021 Aug;14(8):49-51. Epub 2021 Aug 1. PMID: 34840658; PMCID: PMC8570654.

Riera R, Pacheco RL, Bagattini ÂM, Martimbianco ALC. Efficacy and safety of therapeutic use of cannabis derivatives and their synthetic analogs: Overview of systematic reviews. Phytother Res. 2021 Nov 29. doi: 10.1002/ptr.7263. Epub ahead of print. PMID: 34841610.

VanDolah HJ, Bauer BA, Mauck KF. Clinicians’ Guide to Cannabidiol and Hemp Oils. Mayo Clin Proc. 2019 Sep;94(9):1840-1851. doi: 10.1016/j.mayocp.2019.01.003. Epub 2019 Aug 22. PMID: 31447137.

 

 

Partager cet article sur :